Tout est trop précis, trop dense, trop dramatique dans ce livre pour qu’on ne soupçonne une expérience vécue et même une autobiographie déguisée. Sylvie la narratrice, reçoit après une émission de télévision un manuscrit qui la séduit et elle correspond avec son auteur, détenu à Fresnes. Bientôt, la correspondance devient amoureuse, puis Mathieu la presse tant de venir le voir qu’elle obtient un parloir. Et c’est l’univers poignant de la prison, parfois drôle et souvent cruel, que l’on découvre en même temps que Sylvie. Dès lors, son combat sera la conquête de la liberté de Mathieu, même si quelques imperceptibles fêlures se produisent, mensonges gratuits, exigences importunes, demandes d’argent trop fréquentes, tempérées pourtant par une tendresse désespérée. Malgré elle, Sylvie est emportée par la boulimie d’ogre de Mathieu, ses appétits gargantuesques, la magie et le pouvoir de sa voix, de ses promesses. Quand il sort enfin des « hauts murs » pour jouir de cette liberté durement conquise, il est devenu trop précieux pour elle pour que la prudence soit encore possible. Mathieu pourtant n’est pas celui qu’elle croyait... Et c’est la lente plongée aux enfers, la découverte de la violence, du danger et de la trahison, un suspense qui s’accélère au fil des pages, une peur qui devient palpable. Un roman noir renouant avec la tradition américaine des Himes ou Ballinger.