Dresde-Buchenwald-Berlin-Moscou-Vologda-Vorkouta au-delà du cercle polaire arctique : itinéraire sinistre que parcourut douloureusement John Noble, jeté au Goulag le 6 juillet 1945 à l’âge de vingt et un ans, sans motif. À la lecture de son récit, poignant mais sobre, une question parmi d’autres se pose : comment ce jeune Américain a-t-il pu survivre à cette tornade d’épreuves et d’embûches, de tortures et de cruautés prolongées plus de neuf ans ? Les quelques rôtis de chien dévorés clandestinement avec son ami le médecin hongrois n’expliquent que bien partiellement sa résistance surhumaine. Une autre réponse paraît en filigrane. Le mécanisme implacable du système communiste ne peut engendrer que l’esclavage, situation qui provoque parfois des soulèvements, bientôt noyés dans le sang. Le bagnard Gureyvitch, ex-conseiller d’ambassade à Paris déporté par le gouvernement qu’il servait, gréviste en chef à Vorkouta, paye bien cher son héroïque solidarité avec ses compagnons de misère. John, lui, en réchappe finalement. Dieu et l’Amérique n’ont pas abandonné celui qui, dans la simplicité de son cœur, n’a cessé d’en appeler à eux. Dès lors sa mission commence : faire connaître le sort inimaginable de ses anciens camarades forçats, les bagnards du Grand Nord. Son livre ne fait pas double emploi avec les ouvrages de Soljenitsyne et d’autres écrivains du Goulag. « L’Américain » a tenu les registres dans l’une de ses prisons : il connaît ses dossiers mieux que personne. Un document révélateur.