Un écrivain visionnaire introduit le lecteur par descriptions progressives dans un monde antédiluvien ou futuriste peut-être : le fonctionnement biologique des corps, l’interpénétration insensée des règnes (végétal, minéral, animal), la prolifération cellulaire, moléculaire, parasitaire donnent lieu à des accouplements monstrueux et des naissances, des dissociations, des maladies et des fléaux, des révolutions silencieuses, des combats sans merci, des déserts, des grouillements contagieux, des fêtes sombres et gluantes, des festins destructeurs, de gigantesques digestions. Il faut suivre l’itinéraire fabuleux où, tour à tour, les plus étranges paysages (marins, terrestres, spatiaux) s’organisent en cadences de plus en plus rapides comme s’il s’agissait d’atteindre une zone d’absolu inhumain. Si le lecteur accepte de s’y laisser entraîner, c’est que la langue à la fois ferme et puissante de Tibor Tardos convainc à tout instant. L’humour double chaque narration — tragique, burlesque ou poétique - achevant ainsi cette rare entreprise d’envoûtement exterminateur.