Rêveries, c’est-à-dire une pensée solitaire, libre de toute contrainte, de tout programme, capable de se pencher sur l’objet le plus humble comme sur le plus élevé, soucieuse uniquement du mouvement qui l’entraîne vers sa propre vérité et, à travers elle, vers la vérité du monde au milieu duquel elle s’exerce.
Rêveries, c’est-à-dire une suite de petits essais écrits au fil des ans, méditations, fables, souvenirs, portraits, paysages, brèves polémiques — construits chacun à la manière d’un fruit qui peu à peu trouve sa forme et la remplit parfaitement. Qui la trouve dans et par l’écriture elle-même, celle d’une prose dépouillée, aussi simple que lumineuse, proche de la poésie, mais d’une poésie qui serait la voix même du réel le plus immédiat, c’est-à-dire le plus fugace en même temps que le plus durable, que la rêverie seule est capable de saisir sans l’immobiliser, de laisser s’envoler sans le perdre de vue.
Du ver de terre à l’œuvre de Shakespeare, de Troyes en Champagne à la rue Bélanger, de la Bible au boui-boui Chez Fred, de l’instant qui passe au temps qui a passé, le rêveur trouve partout matière à penser, à écrire, à échafauder patiemment le monde, là, qui ne demande qu’à naître.