La première fois où Dizzy Gillespie est venu jouer au club, je lui ai raconté cette histoire. À l’âge de quatorze ans, je jouais de la basse et du hélicon à la fanfare Jules Ferry de l’école primaire des garçons en Guyane Française. J’avais adhéré pendant une courte période à un groupe de musiciens intéressés au jazz ; ces musiciens étaient membres de la fanfare. Ils avaient créé un orchestre de jazz, le « New Jazz School », sous la direction de Géro Frédéric et de Léo Vero ; je jouais de la conga. À dix-neuf ans, j’étais premier clairon pendant mon service militaire. Je jouais aussi de la trompette et de la conga dans un orchestre de danse sous la direction d’Édomir Caberia. Un jour, ma mère avait acheté un disque du chanteur populaire Luis Mariano pour l’offrir à mon beau-père à l’occasion de son anniversaire. J’ai pris le disque à son insu, je l’ai rapporté au disquaire, et je l’ai remplacé par un disque de jazz bebop de Dizzy Gillespie, « The Champ ». Lorsque ma mère a découvert mon impertinence, elle m’a administré une de ces raclées que je n’ai jamais oubliée. Mon destin avec le jazz et les grands du jazz était déjà tracé. Dizzy fut très heureux de m’entendre raconter cette histoire.